Un cursus en statistique publique après une prépa B/L : le témoignage de Cameron
Si rien ne la prédestinait à faire des stats, Cameron Christensen, ENSAI 2022, revendique un certain penchant pour casser les codes. Major-Prépa a interviewé la jeune statisticienne publique.
« Pour débuter cette nouvelle année, j’ai eu envie de te faire découvrir le témoignage de Cameron Christensen, devenue attachée statisticienne à l’ENSAI en 2019 après une prépa B/L. Après un bac ES, rien ne la prédestinait a priori à faire des statistiques son métier. Mais on peut dire que Cameron n’a clairement pas les deux pieds dans le même sabot ! Avec le sourire et l’enthousiasme qui la caractérisent, elle a accepté de répondre à mes questions pour te raconter son parcours et ses années B/L.
Peux-tu nous présenter ton parcours ?
Mon parcours est plutôt atypique mais c’est vrai que depuis petite j’aime bien ne pas faire comme les autres. En quelques lignes, j’ai eu un baccalauréat ES (sciences économiques et sociales) option mathématique avec mention très bien. Puis j’ai eu la chance de faire partie de la première promotion de la classe préparatoire B/L (lettres et sciences sociales) de l’Institut Stanislas de Cannes. A l’issue des deux ans, j’ai intégré l’École Nationale de la Statistique et de l’Analyse de l’information, une école d’ingénieur spécialisée en statistiques, économie et informatique en tant que fonctionnaire stagiaire de l’Insee. En résumé, avec mon parcours j’ai fait du « tout-terrain » i.e. de l’économie, de la sociologie, de la philosophie, de l’histoire, de la littérature, des langues, de l’informatique et des mathématiques.
Actuellement, je suis étudiante en deuxième année et je fais un double diplôme en économie appliquée avec l’Université Paris Dauphine.
Je candidate également pour le Master 2 Evaluation et décision publiques, labellisé European Master in Official Statistics (EMOS) par Eurostat.
Était-ce un projet de longue date pour toi de faire des statistiques ?
Mise à part une anecdote où tout juste âgée de 10 ans je venais d’avoir 10/10 à mon premier devoir présentant la notion de statistiques et où j’annonçais déterminée à ma maman que quand je serai grande je ferai des statistiques, non ce n’était pas un projet de longue date… J’ai jamais eu de vocation ou quoi que ce soit, comme beaucoup de petites filles j’ai voulu être danseuse, vétérinaire ou encore juge. J’ai toujours été une bonne élève, une des raisons pour laquelle j’ai eu beaucoup de mal concernant mon orientation. J’ai choisi de faire un bac ES car j’aimais beaucoup les cours d’introduction d’économie de seconde, et je voulais aussi casser un petit peu les codes comme quoi la voie royale c’était la filière scientifique…
Comment as-tu vécu tes années prépa ?
Huuuu les trois premiers mois choc thermique… Je n’avais pas assez mesuré la température avant de faire une classe préparatoire, je me suis un peu lancée dans le vide, « la classe préparatoire c’est très bien en plus ça me laisse deux années supplémentaires pour réfléchir à ce que je vais faire plus tard.. », la B/L est la plus polyvalente en plus…Il faut l’avouer les trois premiers mois sont très déstabilisants , le rythme est différent, on sort du lycée, et en B/L on a pas mal de mathématiques à rattraper quand on vient de Terminale ES. A cela, on peut ajouter le stress d’être une externe quand tous les élèves de ta classe ou presque (petite mention spéciale pour Galdric) sont à l’internat. Enfin, j’avais décidé que je continuerais de faire du sport très régulièrement (de six à sept jours sur sept) et je ne voulais pas non plus mettre « ma relation amoureuse » de côté, d’autant plus difficile quand le petit ami en question faisait des études complètement différentes d’une classe préparatoire. J’ai eu beaucoup de chance cependant d’être dans une petite classe préparatoire avec des professeurs qui étaient vraiment extraordinaires (et faible est le mot) et dévoués pour leurs élèves. J’ai beaucoup mieux vécu la deuxième année, le rythme est intense mais on « voit le bout du tunnel » avec les concours qui arrivent très rapidement.
Comment as-tu préparé tes concours ?
J’ai fait un « entrainement confinement » un an avant son entrée en vigueur en France. Ma seule attestation de sortie c’était mon rendez-vous quotidien à la salle de sport pour évacuer à la fois le stress et le surplus de connaissances inutiles. Ah oui et je me suis pas vraiment fait de planning spécifique mais je me suis obligée à faire des mathématiques toutes les journées de révision. Et je n’ai mis aucune matière de côté…ce qui est parfois difficile en B/L .
Alors, les statistiques après une B/L, c’est bien ?
Le rattrapage du niveau en mathématiques quand on rentre à l’ENSAI après une B/L c’est un « throw-back to », un retour à l’expérience du passage « Terminale ES à B/L ». Mais en réalité ça se passe bien et puis on est content d’intégrer une école avec les festivités qui vont avec…
Et les statistiques dans tout ça c’est super intéressant, c’est une science « auxiliaire » par définition, ce qui fait qu’on peut l’appliquer à beaucoup de différents domaines.
L’économie, la santé, le sport, le marketing, la finance, l’environnement…En fait on peut tout faire avec les statistiques.
Et puis il ne faut pas penser que les statistiques ne sont que des mathématiques, il y a une grande part d’interprétation c’est nous qui donnons sens aux données… Et la culture générale de B/L se révèle être un solide atout.
Penses-tu que c’est un « plus » (dans ta recherche de stages par exemple) d’être passée par une BL ?
Bien sûr, avoir fait une B/L est même un atout à vie. Nous envoyons un signal fort en venant de B/L… Pluridisciplinarité, capacité d’adaptation, détermination. C’est un atout pour les stages mais aussi pour les recrutements lors de nos futurs postes. Nous sommes inclassables en B/L, nous ne pouvons pas être mis dans des cases, nous avons tous des personnalités très différentes, et c’est généralement très plaisant pour nos interlocuteurs.
Quels sont tes projets au niveau professionnel pour la suite ?
Comme je suis rentrée en tant que fonctionnaire stagiaire de l’Insee à l’ENSAI je suis rémunérée pendant mes études mais je dois travailler en contrepartie 8 ans pour l’Insee.
Mes projets à court terme sont d’obtenir ma place en Master 2 Evaluation et décision publiques et à plus long terme mon rêve serait de devenir administrateur de l’Insee.
Pour cela, je dois passer le concours de l’ENSAE qui me permettrait d’accéder au statut d’administrateur de l’Insee. Les administrateurs sont des cadres supérieurs qui définissent les orientations et les modes de réalisation des travaux confiés à l’Insee. Je peux passer ce concours soit en externe soit en interne après 5 ans dans la fonction publique. (Et ce qui est intéressant c’est que le programme du concours est le même qu’en B/L. Ce qui permet de revoir des acquis et d’avoir le recul nécessaire que l’on n’a pas forcément « la tête dans le guidon » en sortie de prépa.)
Quels conseils peux-tu donner à des B/L qui souhaitent intégrer une école de statistiques ?
Alors tout d’abord, vous devez être fiers d’être en B/L parce que c’est vraiment une chance, on ne le réalise pas toujours quand on est dedans, le temps nous parait figé mais il passe en réalité (et très/trop vite). Profitez de l’abondance de connaissances, de la relation privilégiée avec les professeurs de classe préparatoire (même si j’avoue que de ce côté-là on a beaucoup de chance à l’ENSAI, la relation avec les professeurs est très bonne notamment car l’école est à taille humaine). Respirez ça va bien se passer et au pire lisez des citations de Winston Churchill. Ne pas négliger des matières, elles sont toutes importantes même pour une école de statistiques. Et le travail paye toujours (surtout en mathématiques). »
Une interview réalisée par Amélie Hurteaux.
Plus d’informations sur le cursus statisticien public de l’ENSAI.